La fission de l'âme [PV]

L’errance de l’être né de la coalescence fut de courte durée. Enrobé d’une robe de flammes irisées qui lui concédait une prestesse inouïe, Vegeto s’était fort bien rapidement éloigné de la capitale du l’astre bleu, sillonnant sans discontinuer les nuages qui faisaient front à son avancée. Son envol toucha à son terme lorsqu’il vint à survoler quelques contrées verdoyantes, épargnées par l’activité humaine. Oeillant le canton avec intérêt, le Saiyan entreprit une descente contrôlée qui fut tout aussi courte que son périple aérien, celle-ci aboutissant en un atterrissage autant sirupeux que ne lui permettait son aura déchaînée. Calmant cette dernière pour laisser sa tignasse hirsute virevolter au gré du vent, une danse synchronisée avec le va-et-vient de son ample dogi, le natif de Vegeta profitait de ses derniers instants en laissant ses prunelles de jais se délecter du paysage sauvage.

Maintenant que la menace la plus immédiate avait été endiguée, il était temps pour le champion à la double voix de disparaître et de laisser les braves âmes qui lui avaient donné naissance reprendre le cours de leurs vies mouvementées. L’union provoquée par le port des artéfacts divins qui pendaient à ses oreilles lui avait été décrite comme étant permanente, une contrainte qui autrefois avait rendu la décision difficile. Pourtant, grâce à l’aide exceptionnelle de l’un des plus éminents personnages qui lui eût été donné de connaître, Vegeto n’était pas pour cette fois sujet à cette regrettable déficience. N’ayant qu’une seule parole, Kaito avait usé de sa magie afin de fournir une rune de fission de l’âme au guerrier né de la coalescence. Le maître du flux temporel lui avait réellement mâché le travail, à son grand plaisir. Vegeto aurait autrement dû faire appel au pouvoir des boules de cristal afin de mettre un terme à son union, et le couple d’âmes qui cohabitaient dans son seul corps n’aurait apprécié la prolongation de leur coexistence qu’engendrerait une entreprise si chronophage.

“ Bon et bien, on dirait que c’est fini pour moi. ” Ricana-t-il malicieusement, le visage décoré d'un rictus narquois.

Le Saiyan aux boucles d’oreilles poussa un long soupir. Loin de lui l’envie de retarder l’échéance. Le moment était venu de libérer ses pères. Faire appel à la sorcellerie de la déité temporelle était volontairement rudimentaire : il ne suffisait à Vegeto qu’à le souhaiter afin de faire cesser la coalescence. Ce faisant, un éclat de lumière éblouissant vint épouser son profil rugueux, illuminant ciel comme terre et l’aveuglant lui comme tout autre qui se serait trouvé dans les parages, le tout accompagné d’un sifflement léger mais qui, pour l’intéressé, paraissait assourdissant. L’existence de Vegeto toucha à sa fin lorsque de cette lueur fulgurante naquirent deux silhouettes bien distinctes…

Dans un sens, j'ai vraiment l'impression d'être exploité sous cette forme fusionnée: je l'avais déjà ressenti lorsque nous avions affronté Buu sous cette forme. Je n'ai guère de contrôle, en tout cas pas assez, avec toujours l'impression d'être freiné par Carot à un moment.
Mais très clairement, j'avais besoin de son... argh, même intérieurement ça m'arrache d'admettre ça, mais... je n'étais pas de taille face à Auros. Il n'avait vraiment rien à voir avec le démon rose et vue ma perte considérable de puissance, je ne pouvais clairement rien faire seul.

C'est donc avec soulagement mais aussi énormément d'amertume que je reprends le contrôle de moi-même, même si je sens bien vite la faiblesse s'emparer de moi. C'est encore trouble dans mon esprit, mais je sens bien la différence de niveau entre la fusion et moi. Concernant Carot... je n'ai guère envie de m'attarder sur la comparaison, parce que le résultat me semble plus qu'évident.
Dans mon état actuel, j'avais bien besoin de me retrouver entouré de dieux de la destruction et d'être bien supérieurs à moi, à mon meilleur niveau... Je suis partagé entre l'envie de m'éventrer d'un Big Bang ou m'enfermer des mois durant dans une salle de gravité, pour m'entraîner ardemment...

Je finis par grommeler longuement, en toisant mon éternel rival du regard:

- Erf, c'est la deuxième fois et je ne suis toujours pas habitué à ce truc... Enfin bon, je peux difficilement me plaindre, vu que c'est moi qui aie voulu le plus fusionner...
Par contre j'ai pas le temps de jouer avec toi, Carot, j'ai d'autres Saibaimen à fouetter et bien des choses à faire, avant d'avoir été interrompu par tout ce bordel.

Je masse mon front un moment, mon regard balayant les environs; au moins nous sommes déjà sur Terre et ça m'arrange, parce que je n'ai pas envie de m'ennuyer comme un rat mort dans une capsule de voyage... et demander une téléportation à Carot me gave déjà d'avance...

Le glas de l’existence de l’être né de la coalescence avait été sonné, et de l’éclat prodigieux qui en naquit s’ébaucha une silhouette familière pour beaucoup, sa tignasse hirsute reconnaissable entre mille. Dès lors libéré de cette union tant rocambolesque que salvatrice, Gokū s’offrit une longue et profonde inspiration, laissant ses propres poumons profiter d’une bonne cure d’air frais. Il lui fallut quelques secondes afin de s’acclimater à sa nouvelle et paradoxalement ancienne condition, la perte évidente de puissance qui en découla n’étant qu’une dérisoire infortune face au regain de son plein libre arbitre. Bien qu’il ne fasse point preuve de la même aversion que son confrère guerrier de l’espace à l’égard de la fusion, en particulier compte-tenu des circonstances souvent dramatiques qui l'occasionnaient, le disciple des tortues ne pouvait dénier prédilectionner sa propre enveloppe corporelle. Portant son regard sur son présent rival davantage grognon pour ne rien changer, l’artiste martial cru bon s’essayer à une brève jacasserie dans une vaine tentative de briser la glace.

“ Bon bah ça s’est plutôt bien passé, au final ! ” S’exclama-t-il toutes dents dehors, les poings posés sur ses hanches.

De son côté, le prince des mercenaires de l’espace se plaignait de son manque d’accoutumance au phénomène si particulier qu’était la coalescence. En effet, malgré l’apparente parité de l’acte, il était vrai que le caractère insouciant et miséricordieux du guerrier élevé sur Terre paraissait prendre le dessus sur la froide austérité si propre à Vegeta. Conscient des ramifications cataclysmiques de la bataille à laquelle ils venaient de prendre part, l’héritier du trône n’avait pourtant pas hésité à joindre ses forces avec ce nigaud de Kakarotto au nom de la préservation de ce qui lui tenait le plus à cœur. Ce sacrifice cémentait la nature davantage bienveillante du petit prince, au grand plaisir de Gokū qui, il y a de cela quelques années déjà, s’était réjouit de la voir tourner la page et abandonner ses anciens vices. Se reconstruire de la sorte était une longue et lourde tâche mais de pareilles difficultés ne pouvaient espérer freiner le grand Vegeta !

Enfin, tout cela était bien beau mais il ne fallait pas non plus abuser des bonnes choses ! Dans toute sa frigide indulgence, l’époux de Bulma fit rapidement comprendre à son pire ami qu’il ne comptait pas s'embarrasser de sa présence pour bien longtemps. Une telle semonce était toute attendue de sa part, et Gokū ne comptait pas faire obstacle à sa volonté et risquer d’épuiser le peu de patience qu’il devait rester à son rival.

“ Hihi, je vais pas te retenir, Vegeta ! Mais merci ! On s’en serait jamais sortis sans ton aide ! ”

En effet, le pouvoir des potaras fut crucial pour permettre aux deux Saiyans de rester dans la course, et l’objectif pour Gokū était désormais de parvenir à combler cette faiblesse. Pour ce faire, le naïf martialiste comptait poursuivre son apprentissage de l’emploi de l’énergie des divins à laquelle il s’était auparavant éveillé et continuer à renforcer son corps afin de pouvoir contenir ce nouveau type de force vitale. Ce dernier point était d’autant plus important vis-à-vis de l’invitation on-ne-peut-plus excitante qui avait été adressée au duo peu avant leur départ du Kaioshinkai.

“ Maintenant, va falloir bosser dur ! À notre niveau, y’a aucune chance qu’on survive à l’entraînement de Beerus ! ”

Idéalement, il leur faudrait devenir à peu près aussi puissants que l’être engendré par leur fusion. Une prouesse à première vue invraisemblable mais rien ne restait impossible bien longtemps pour quiconque se donnait les moyens de réussir. C’était un nouveau défi qui venait donner un second souffle à la motivation pourtant sempiternelle du champion de la planète bleue, un nouveau challenge dans lequel Gokū était sûr que son rival se jetterait corps-et-âme à sa propre façon.

“ Sur ce, je te laisse ! À la prochaine ! ” S’écria-t-il en adressant un bref salut de la main à son partenaire avant de faire jaillir son aura opaline puis de laisser celle-ci le porter par-delà les quelques nuages qui serpentaient l’horizon.