La qualification à peine légale.

"Oui, oui, pour le tournoi."

Le petit type en costume nœud-papillon possède des yeux clos permanents. Il voit parfaitement bien, mais il a juste les yeux fermés à jamais. Comment est-ce qu'il fait pour voir. Genre, c'est même pas des yeux plissés, ou bridés. C'est vraiment 100% fermé. Et il voit les environs comme une personne tout à fait normale. Le truc, c'est que tous les autres types à l'accueil lui ressemblent. Genre, il y a eu un clonage massif de nains aveugles, sourds et muets, et ils ont tous été achetés par le propriétaire du terrain et l'organisateur du tournoi. C'est quoi ces conneries ? Donc le nain est en train de lire des papiers sur le tournoi, tout en me regardant toutes les 35 secondes exactement. Un ennui total. De temps à autres, il pose une question sur le pourquoi et le comment. Alors je réponds. C'est lent l'administration. Je suis toujours impeccablement camouflé dans la masse, à l'aide de mon fédora, de ma chemise Hawaïenne, et de mes lunettes de soleil de sport. Personne n'est en train de me regarder bizarrement.

Après un petit instant, le petit bonhomme se lève de son siège, que je qualifierais plus de marche d'escalier, pour se déplacer vers un petit bureau à coté de lui. Il était dans une petit cabine à l'entrée du terrain, séparé de moi par un frêle mur de verre, aussi communément appelé une vitre. Il parlait de temps à autre en usant de son microphone, ce qui niquait complétement sa voix. Le truc était qu'il y avait un trou dans la vitre, afin qu'il puisse directement me parler. Mais non, Peter Dinklage mélangé à Pierre de Pokémon ici présent parlait très doucement dans son micro, car c'était nécessaire de faire un ASMR avec une qualité de son dégueulasse. Heureusement qu'il voyait pas le type que j'étais en train d'étrangler pour me calmer les nerfs. Il est donc à son petit bureau à présent, et il tape très lentement sur un ordinateur, regardant précisément si tel est une bonne lettre, et se mettant et s'enlevant des lunettes toutes les quarante-quatre secondes pour se relire. Après huit cent quatre-vingts secondes, donc un peu plus de quatorze minutes il se déplace, et sort en me tendant une feuille, et une sorte d’agrafeuse. Il s'en sert pour me tatouer une sorte de code barre invisible sauf à je ne sais quelle lumière sur le bras, ainsi que pleins de papiers, qui ne servent à rien pour entrer dans le tournoi. Il me donne aussi une chambre dans un hôtel près du terrain. Ainsi qu'un litre de tickets restos. Très bien, me dis-je. J'éviterais les homicides un petit moment, j'imagine.

Je décide donc d'aller au resto d'à coté, et de balancer mes tickets restos à la gueule du type pour avoir de la bouffe. Il se tire en courant, comme tout le reste des clients. Je décide donc d'en rattraper un et de le bouffer sur place. Un petit bruit d'aspirateur se met en place alors que lui plante mon dard dans le cou. Je capture aussi un type pour qu'il me lise les moments importants des documents, c'est un gothique fan d'anime, d'après sa gueule et son eye-liner plus puissant que celui de toute femme ayant jamais marché sur Terre. Il me lit le truc avec sa voix en pleurs qui se saccade de temps à autre. Ce doit être vachement émotionnel comme document. J'ai limite envie de m'endormir quand il parle d'un "combat qualificatif". Un combat qualificatif ? Donc je dois d'abord casser la gueule à un random avant de pouvoir participer ? Scrogneugneu alors ! Il me dit que je suis censé combattre un autre participant voulant se qualifier, dont le numéro est "vingt-trois dix-neuf". Très bien. Je prends le type et le balance dans une cuve d'huile bouillante, parce que c'est marrant. J'ai dû faire trois essais afin d'y arriver, mais c'était worth it. J'ai aussi foutu un bordel dans la cuisine. Je plains l'agent d'entretien.

Par ennui, j'explore les environs. Il y a un étage. Il n'y a rien à l'étage. Hormis deux types déguisés en Superman et Batman, qui procèdent à une opération de reproduction intense avec comme outil beaucoup trop de cuir. Je redescends donc pour laisser leur mission de repeuplement se faire dans la joie et la bonne humeur. Je regarde de nouveau le rez-de-chaussée. Il y a pas énormément de choses non plus. Si, un frigo, et une étagère. Je pille le chocolat, et la viande. Le type est toujours dans sa marmite d'huile bouillante, et il bouge les pieds de temps à autres. Une fois avoir ruiné l'endroit, je décide de partir. Sauf qu'il y a une porte que je n'ai pas encore exploré. Une dont je ne sais pas où elle mène. Qu'est-ce que j'ai à perdre ?

C'est un sous-sol, et tout est sombre. Je pourrais tenter d'adapter ma vue, mais j'ai la flemme. Alors j'allume la lumière. Cet endroit est extrêmement riche en... tonneaux. Des dizaines et des dizaines de tonneaux, les uns à coté des autres. En lignes et en colonne. C'est le mausolée de l'empereur, sauf que l'armée de soldats en terre cuite est une armée de cylindres en bois. Je décide de regarder à l'intérieur. D'un coup de poing vif j'enlève le bouchon. J'observe le contenu par le trou, et j'en déduis que c'est un liquide. Me disant qu'il fallait que je goûte afin de savoir si c'était bon, je pris le tonneau et le bus en entier.

C'était vraiment bon.

Très bon. Quoi qu'un peu... Fermenté.
Ouais, c'est ça. Fermenté. Il y avait de l'alcool, à l'intérieur. Cela brûlait la gorge. Mais bon, cela restait bon... Qu'est-ce que je faisais déjà ? Ah ! Oui, c'est ça ! Trunks ! Non... Les souvenirs me reviennent. Trouver le Vingt-Trois Dix-neuf, pour se qualifier au tournoi. Très bien.
Je sort de la cave. Arrêt du temps. J'ai foutu un énorme bazar. Qu'est-ce que j'ai pensé ? Cela pouvait me faire dégager du tournoi. L'arrêt du temps continue, j'aspire des gens au passage, pour regagner de l'énergie. Aucun témoin dans le temps arrêté. Aucune personne pour dire du mal de moi. J'enchaîne les piétons qui passent dans la rue, innocemment, sans vouloir de mal à personne. Pas de bol !
Bientôt, j'arrive à une sorte de bâtiment, près du stade. Un hôtel pour les candidats ? La porte donne sur un couloir. J'entre et sors des loges une par une. Le temps est toujours arrêté, ce qui me permet de voir les papiers d'inscription de chacun. Quarante-cinq zéro cinq; quatre-vingt-huit quatre-vingt-quatre... La liste est longue. Après les avoir toutes inspecté - et avoir aspiré certains des gens y habitant - je décidai d'aller au premier étage. Après de nouvelles recherches, je tombe enfin dessus.
Le vingt-trois dix-neuf est un jeune humain qui regarde avec tristesse une photographie de sa mère. L'arrière-plan de l'image est un bidonville. Son attirail est tout sauf cher. Mais il a dû s'entraîner toute sa vie, pour tenter de gagner un peu d'argent histoire de nourrir sa famille. Le tournoi devait être sa meilleure chance pour prouver que rien de cela n'était vain. Que le combat est un art. Qu'il avait raison. Ce tournoi doit être sa meilleure chance de gonfler son ego ainsi que ses poches.
Cela est bien triste.
Je lui casse les bras, et les jambes. Le temps est toujours arrêté. Je le trimballe jusqu'à un bureau. Je dégage le type présent par la fenêtre. Je pose mon trophée sur la table. Le type qui gère le bureau est un nain aux yeux fermés en permanence. Personne n'a rien vu. Aussitôt, pour la mise en scène, je claque des doigts. Le temps reprend son cours. Le vingt-trois dix-neuf se met à hurler.

"Je suis qualifié ?"

Le nain me regarde très fort avec ses yeux fermés.

"Oui."

"Cool, merci."

C'était donc fait. Je suis qualifié. Le but maintenant était de m'entraîner. De gagner de la puissance. Cela allait demander des efforts, de la concentration, de la discipline.
Ou je pouvais juste bouffer plus de monde, aussi. Ah ah ah !

...
Je me réveille avec un terrible mal de tête. Un appartement ?.. Des souvenirs reviennent petit à petit.
...
Ok, je suis qualifié. C'est déjà ça.
Pourquoi y a-t-il autant de tonneaux dans cette pièce ?
...
"Boire en cas de souci"
...
Quoi ?