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 So this is life

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Narumi Karuzaki
Narumi Karuzaki
Démon
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MessageSujet: So this is life    So this is life  ClockSam 28 Aoû 2021 - 21:33

Accompagnée mais seule. Entourée, mais toujours dans la solitude. Depuis combien de temps cette sensation lui collait à la peau ?

Ses yeux ambrés - voué à une grande destinée, ceux qui possèdent les prunelles fauves, disaient les oracles - regardaient sans regarder. Quel fatum extraordinaire avait-elle eu ? Être esclave avait constitué une bonne moitié de son existence. La guerre avait parsemé l’autre, jusqu’à maintenant encore. Rien ne se règle jamais à l’amiable avec les humanoïdes, les êtres conscients de ce monde. Ceux qui sont pacifiques se font exterminer. Les faibles périssent les premiers. Ceux qui les protègent finissent par mourir. C’était comme ça que Narumi mourrait, elle aussi. C’était une conviction inéluctable.

Cela faisait depuis la césure avec l’alliance des Black Feather que la louve ne s’était pas regardée dans un miroir. Réellement, pas juste à l’improviste pour s’attacher les cheveux ou vérifier si ses vêtements étaient ajustés correctement. Chaque fois qu’elle croisait son visage, un dégoût inévitable l’envahissait. Son esprit la torturait, susurrant à répétition des mots pour l’achever :

Tu n’as rien appris de la vie pour une esclave. Tu t’es faite avoir par un monstre aux allures de gentleman. Tu es pathétique.

Cela n’avait fait que renforcer sa détermination à le crever. Narumi n’en était plus au stade où elle désirait tuer Seishiro Kasai. Elle voulait l'annihiler. Lui, son empire, ses sbires, son monde. Donner la mort aux inconscients qui continuaient de le suivre ne serait qu’apporter la rédemption à ces pauvres hères. C’était exactement ce que cette chose inhumaine qui se faisait appeler SK avait fait. Peut-être que la vengeance ne changerait rien à sa douleur, mais par contre, cela sauverait un nombre incalculable de vies.

Et puis, être sans nouvelles de Wolfang lui crevait le coeur.

Oui chef(fe) !” criaient les soldats en cœur et Narumi y compris, elle qui quotidiennement s’entraînait aux côtés de ses Hommes sans faire de distinction de grade. Leurs instructeurs étaient tantôt des femmes, tantôt des hommes, et peu importait leur genre. Leur expertise renforçait l’armée, leur cœur et leur esprit également. Chaque jour la Cheffe de l’armée suivait différents entraînements en fonction des spécialités et des sections - elle touchait un peu à tout et demandait l’avis des soldats sur les possibles défauts et améliorations à apporter aux exercices. Personne avant Narumi ne s’était donné coeur et âme à l’armée. C’était cela qui expliquait l’adoration parfois fanatique des soldats à son encontre, et même sa côte médiatique était à son apogée sans redescendre et sans qu’elle ne passe dans des émissions - elle qui n’aimait pas se donner en spectacle.


Par ailleurs, quelques jours auparavant, sa rencontre avec Akaza et Xiomara avait été lucrative. Autant avait-elle compris la réaction de l’être bionique autant il avait eu le droit à un regard noir en menaçant Narumi tel qu’il l’avait fait avant de s’éclipser. Toutefois, ses réactions paradoxales laissaient penser à la louve qu’il était une sorte d’enfant perdu et traumatisé, enfermé dans le corps d’un adulte qui se voulait excentrique pour mieux se protéger du monde extérieur. La Draegghan saurait garder un oeil sur lui et le rappeler à la raison au besoin, semblait-il. Et les agents du service d’espionnage de l’armée s’occupaient déjà de retrouver les détracteurs du rouquin, c’était l’essentiel.

Ces pensées tournaient dans sa tête, mais la douce voix d’une semblable l’en tira :

Vous ne cessez d’être un modèle pour vos pairs. Malgré tout ce qui peut vous atteindre négativement dans votre vie, vous n’abandonnez jamais.” La médecin en chef de l’armée surveillait l’état de santé de la guerrière régulièrement. “Vous avez atteint votre objectif, cheffe ! 88kg de muscles pur. C’est du sérieux, dites-moi !

S’il existait un terme plus agressif que la haine, il serait de mise. La mère éplorée ne vivait que pour effacer du monde un être qui lui avait tout pris. Mais pas seulement qu’à elle, à tant de ses semblables. Rien ne faisait dévier de son but la louve, qui, continuellement, s’endurcissait et mettait son esprit ainsi que son corps à rude épreuve pour devenir celle qui éradiquerait Seishiro Kasai une bonne fois pour toute.

Récemment, Narumi avait concentré la communication de l’armée envers les personnes “sans”. Ces êtres qui n’ont aucun but, qui croient n’avoir aucune valeur. Ceux qui sont perdus, qui se sentent rejetés ou délaissés.

Vous qui êtes seuls, vous qui croyez que votre place n’est nulle part. Nous pouvons déceler vos compétences. Vous trouverez votre place à nos côtés et vivrez une vie respectable, au service de votre planète et de vos concitoyens. Nous rejoindre, c’est décider d’offrir le plus grand honneur à la Terre.

Cette publicité simple et directe mettait en scène Narumi sans artifices. Celle-ci était habillée avec une tenue de soldat classique qui la faisait se fondre dans la masse, renforçant sa primo image de “celle qui ne se considère pas au-dessus de ses camarades malgré son grade”. Ce coup de comm° avait redonné de l’espoir. Donné du courage à des êtres perdus qui avaient osé s’avancer aux portes de l’armée pour y trouver leur destinée. Du jour au lendemain, des sans-abris, des veuf/veuves, des personnes perdues se retrouvaient à s’exercer aux arts martiaux aux côtés de Balalaika, Narumi, d’autres figures emblématiques de l’armée, et plus important : à côté de ses soeurs et de ses frères. Car chacun ici avait une réelle importance, c’était ce qu’avait prouvé et instauré Narumi à ses débuts en tant que Cheffe.

Et puis, être sans nouvelles de Tentra la tuait.

Le temps s’écoulait et son sommeil ne revenait toujours pas. Il avait commencé à l’abandonner, petit à petit, il y a quatre ans, en réalisant que SK la laissait de plus en plus de côté - et qu’il continuait de voir d’autres femmes, puisque la louve était capable de sentir les phéromones d’autres concubines qui se dégageaient de lui. De fait, elle n’eut d’autre choix que de s’y faire, peu importe le mal que cela lui avait fait.
Si Seishiro lui en avait parlé avant de faire quoi que ce soit, il aurait été possible que Narumi accepte qu’il ait d’autres relations. Mais jamais il n’en avait été question, jamais ils n’avaient de discussions sentimentales. Ils ne discutaient que des plans de SK, et le peu de sentimentalisme qu’ils pouvaient échanger n’était sincère que d’un côté. Seishiro ne faisait qu’enjoliver les choses et détourner les propos à son avantage, changer de sujet dès que quelque chose lui posait un souci. Et, bien sûr, il profitait du corps de Narumi sans respecter son coeur.

Cette idée la rendait malade.

Avant lui, elle n’avait eu que son premier conjoint, l’un de ses maîtres vampires qui avait été brûlé vif pour s’être épris de Narumi. Suite à ce drame, la militaire était restée célibataire pendant des décennies, incapable d’être amoureuse de qui que ce soit. Il avait fallu que, telle la plus grosse imbécile intergalactique, elle tombe dans le panneau d’un des plus grands escrocs de l’histoire. Quelle parfaite idiote. Jamais elle ne se pardonnerait sa crédulité et son manque de discernement.

Allez, allonge-toi. Tu as assez bossé, et demain c’est ton jour de congé forcé. Tu vas pouvoir dormir plus que quatre heures cette nuit ! You-hou !

Seule la Maréchale Balalaika Stronoff avait le pouvoir de faire dormir la Cheffe des armées.

Après de nombreuses insomnies et des malaises récurrents à cause de ce fait, la blonde avait compris que Narumi n’arrivait plus du tout à dormir. Celle-ci s’était alors proposée pour l’y aider.

Ainsi, chaque soir depuis la catastrophe, Balalaika venait mettre un stop à la louve pour lui ordonner de dormir, au moins un peu. La cheffe ne se faisait pas prier. Habituellement, fermer les yeux et sombrer dans un vide inquiétant ne pouvait pas être un repos apaisant. Son séjour dans le néant en avait ajouté une couche sur son incapacité à dormir. Mais, là, avec la présence de la Maréchale, tout était radicalement différent.

Les pouvoirs de Balalaika lui permettait de s’endormir en revivant des souvenirs… heureux.

Bonne nuit Balalaika. Et, merci.” Lui chuchotait avec la plus grande gratitude du monde Narumi, chaque soir. Cette fois-ci, et pour la première fois en plus d’une année, la militaire déposa sa main sur le poignet de la Maréchale pour donner plus de poids à ses remerciements. Ce qui surprit sa subordonnée, assez pour qu’elle détourne les yeux en rougissant.

Quelques instants après, la berceuse reposante qu’était la voix de sa congénère emportait Narumi dans un sommeil nimbé de souvenirs profonds et joyeux. Ce soir-là, elle se revoyait donner la main à Tentra, déambulant au plus profond de la forêt terrienne pour lui faire rencontrer l’incarnation de la Nature en personne…

En voyant un tendre sourire naître sur les lèvres de sa supérieure, Balalaika la devina assoupie. Celle-ci resta tout de même quelques minutes supplémentaires à ses côtés, caressant les longs cheveux détachés de Narumi qui reposaient en cascade contre le divan. C’était sa rivale et sa meilleure amie à la fois. Mais depuis quelque temps, son coeur se pinçait d’un désir nouveau quand ses yeux rencontraient sa commandante, et cela commençait à inquiéter Balalaika…

Enfin. Aujourd’hui était un jour particulier : le jour de repos de Narumi Karuzaki. Levée aux aurores après quatre heures de sommeil. Rendormie par les bons soins de Balalaika qui lui rappela que c’était un jour de congé que Narumi se devait de respecter.

Au moins un, cheffe. Tu devrais prendre une semaine entière mais ! Je sais ! Je ne me fait pas de faux espoirs. Allez, rendors-toi un peu.

Alors la louve se réveilla après quatre heures supplémentaires de roupillon. Pour autant, elle ne se sentait pas plus reposée que d’habitude, tellement elle en avait à rattraper, du sommeil.

Narumi pouvait faire ce qui lui plaisait aujourd’hui. N’importe quoi. Mais rien d'extravagant ne lui passait par la tête; rien du tout tout court, même. C’était le grand vide dans sa vie. Sans l’armée et sa famille, elle n’était plus grand chose. La louve ne savait plus ce qui lui plaisait, ne connaissait plus ses passions, ses passe-temps favoris. Le temps que la commandante s’accordait était tellement dérisoire que, se retrouver seule face à elle-même n’avait rien de plaisant. Elle se sentait vide.

La louve vivait littéralement dans son bureau de travail - des pièces annexes assez grandes pour y vivre y étaient installées avec tout le nécessaire. En cherchant des vêtements à mettre, Narumi se rendit compte qu’elle n’avait que des habits confectionnés pour se battre. Pas de tenue coquette, de tenue de soirée ou ce genre de choses frivoles et inutiles de son point de vue. D’ailleurs, la concernée évitait soigneusement les soirées de gala pour ne pas à avoir à se ridiculiser en portant une robe - elle y envoyait Balalaika, que ça ne dérangeait pas.

C’est comme ça qu’elle se retrouva à déambuler sans but dans Satan-City. Sans gardes du corps évidemment : en étant plus forte que ses protecteurs, ça n’avait aucun intérêt, déjà. De plus, c’est une femme simple et tout le monde le sait, les gens sont accoutumés à sa personnalité. Ceux qui viennent lui parler ne se font pas envoyés paître tant qu’ils ne deviennent pas inconvenant ou envahissant.

D’ailleurs, elle s’assied sur un banc après être allée acheter quelques gâteaux à la boulangerie.

Ouaah, Narumi ! Qu’est-ce que vous faites ici ?
Bonjour. Je suppose que je profite d’une belle matinée en mangeant des pâtisseries. Vous voulez vous asseoir ?
E-euh, oui, bonjour ! Ah ben, avec plaisir m’dam !

L'interpella une première fille à l’apparence d’un Rottweiler.

Alors, on prend une pause Cheffe ? Je n’aurai jamais cru tomber sur vous un jour ! J’avais entendu dire que vous veniez à de rares occasions par ici. Pour votre anniversaire et d’autres fois au hasard dans l’année pour manger des gâteaux. C’est vrai que vous les partagez avec les passants qui s’arrêtent, alors !

Se réjouit un homme à la retraite qui promenait son lion du tibet - un molosse gigantesque à la fourrure dense. L’animal se sentit tout de suite attiré vers la louve de par sa nature. Celle-ci tendit les mains, après se les êtres lavées avec une lingette, pour gratter l’animal derrière les oreilles.

Il y a de la place pour vous, ce serait un plaisir que vous nous rejoigniez.” Répondit-elle. Ensuite, elle leva les yeux vers le maître du chien et poursuivit : “C’est valable pour vous aussi.

Ce dernier éclata d’un rire sincère et rejoignit le trinôme. (En comptant le chien !)

Hé ! Mais t’es Narumi ! Salut ! T’es encore plus belle en vrai !

S'écria un adolescent qui passait par-là en hoverboard. Ce dernier mit fin à sa course pour s’approcher du quatuor. La Cheffe de l’armée leva les yeux vers lui pour le saluer d’un geste de la tête, les mains pleines de crème, à l’instar de la fillette et du vieillard assis à ses côtés.

Ben, ça t’fait pas plaisir mon compliment ?

Ce n’est pas un compliment pour moi.” Répondit-elle simplement après avoir léché une partie de la crème sur sa religieuse au café. “La beauté n’est qu’un hasard, et d’une personne à une autre elle n’est pas forcément une vérité. Par contre, mes valeurs et le cœur que je mets dans mes combats au quotidien, ça c’est quelque chose qui compte et que personne ne peut remettre en cause, peu importe qui me regarde.

Le jeune homme s’assied aux côtés de ses nouveaux compagnons, et ils discutèrent tous ensemble de ce qui comptait ou non dans la vie, les mains et le palais recouverts de sucre.
Là, au milieu de nul part, dans Satan-City. Un grain de sable dans l’Univers.

Et puis, même sans nouvelles de ces êtres à qui elle tenait, jamais elle n’abandonnerait. C’est en croisant le regard de chacun de ses compatriotes que cela se confirmait.
 
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