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 Cauchemar en Kouisine

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Yuuma Toutetsu
Yuuma Toutetsu
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MessageSujet: Cauchemar en Kouisine   Cauchemar en Kouisine ClockMar 11 Juil 2023 - 2:25
Pour la Terre, les humains sont comme des insectes, dévorant tout ce qu'elle possède. Rivière, Forêt, Montagne, Animaux… Tout est bon si cela leur permet d’avoir plus dans leur assiette. Yuuma comprenait cela que trop bien. Après tout, c’était une taotie, une ancienne créature mythologique, également connue sous le nom de monstre de la gourmandise. Qu'avait-elle dû penser quand elle a vu la nature sans fond de la cupidité humaine ? Peut-être voyait-elle les humains comme ses semblables ? Des semblables ou bien des esclaves… Les deux, n’étaient-ils pas tous les deux sous le joug de cette coupe son fond nommé : Avarice ?

Les enseignes étaient parfumées de senteurs toutes plus exquises et savoureuses les unes que les autres. Toute sauf une… “Chez Antonio”, un établissement plus que modeste qui semblait chercher son identité entre décharge et restaurant miteux. Sérieusement, ils arrivaient à distribuer des brochures publicitaires au sujet de ce vieux bouiboui miteux ? Ce n’est qu'à cet instant que la bête comprit que le petit dépliant n’était pas une publicité, mais un appel à l’aide. Compréhensible… le gars derrière cet appel était capable de transformer un S.O.S en invitation à dîner et l’inverse était tout aussi vrai à en juger l’état déplorable de la façade. Allait-elle pénétrer à l’intérieur malgré tout ? Bien sûr que oui ! Toute cette marche à suivre des gribouillis sur une feuille ça creuse ! Il en fallait plus que ça pour la dégoûter après tout. Au diable, l’appel à l’aide, la Taotie s'en fichait… Enfin ça, c’était avant qu’elle ne passe la porte du dit restaurant avec sa cuillère démesurée adossée à son épaule.

Alors qu’elle fit son entrée au sein de l’établissement. Un quarantenaire se précipitait vers elle, des étoiles plein les yeux comme si le prophète venait de s’être présenté à sa porte. L'excitation était telle qu’il était impossible de déchiffrer la moindre de ses paroles.

Illustration:

Apparemment, il était perdu dans un délire comme quoi elle devait très certainement être une “grande cheffe de renommée” pour avoir un ustensile aussi gigantesque. Il n’avait pas tort dans le fond… Là d'où elle venait, Yuuma était en effet une cheffe… Mais ce terme n’était sûrement pas associé au rôle que le propriétaire de l’établissement lui adossait. Non… la Tatotie était loin d’être une cuisinière, loin de là… Elle était avant tout une leader, matriarche d’une alliance aux activités quelque peu douteuses. Les couteaux sont de la partie, mais ils sont comme qui dirait… pas juste là pour éplucher des légumes.

-Ouai ouai… bien sur… Fermez là. Une table, tout de suite…

Moins de parlote et plus de dégustations… Yuuma ne prenait même pas la peine ni le temps de présenter son nom. Ça n’avait pas d’importance lorsque son but premier était de se remplir la panse. Verdict ? Même pour la bête avide et gloutonne, le repas était très… “fade”. Ce qui reviendrait a “extrêmement mauvais” pour le plus commun des mortels. À côté, manger les chaises et les rideaux dont le propriétaire semblait si fier paraissait plus enviable. C’était de la merde voilà tout. Et inévitablement, ce fâcheux repas impactait drastiquement le caractère du monstre aux yeux rouges.

Sans crier gare, elle renversa la seule table occupée de ce restaurant -c’est à dire la sienne- en poussant un cri de colère presque bestiale. Humains si avides, humains si créatifs… Quel outrage ! Quelle trahison ! Quelle horreur d’avoir goûté à quelque chose d’aussi ennuyeux. Le chef cuisinier n’avait certainement mis aucune passion dans ces plats. Pire encore, aucun des employés ici présent ne devait avoir la moindre envie de manger la nourriture qu’ils servaient. Personne… PERSONNE… Car dans ce repas infâme, aucune trace de désir ou d’envie n’avait été trouvée. Le désir, assaisonnement pourtant préféré de l’impitoyable Taotie.

Car les hommes semblaient avoir oublié ce qui faisait d'eux des hommes… Yuuma se sentit obligé de les aider. Quand bien même elle n’était pas elle-même une cheffe cuisinière, sa bouche connaissait mille et une saveur qu’aucun mortel ne pouvait imaginer. Aucune créature ne peut survivre à la séparation avec ce concept certes simple mais pourtant essentiel : Nourriture. Néanmoins, les hommes ont cette fantaisie qui leur est propre : celle de cuisiner ce qu'ils vont manger. Découper, éplucher, émincer, taillader, rôtir, déplumer, écailler… Un véritable spectacle de l’horreur dans le but de projeter leurs désirs dans l'œuvre façonnée et dénaturée destinée à être consommée. C’est bien ça qui fait la différence entre un restaurant et des plats surgelée n’est-ce pas ? Après tout, les plats conçus à la chaîne par des machines n’ont très certainement pas la même saveur que ceux fait par la main de l’homme.

-Les animaux sauvages ne cuisinent pas… qu’importe leur échelle dans la chaîne alimentaire, au mieux, ils stockent et font des réserves. Dites moi Antonio, un homme incapable de cuisiner comme il se doit peut-il réellement prétendre être au sommet de la chaîne alimentaire ? Grommela le monstre à l’estomac sans fond tout en faisant traîner sa gigantesque cuillère contre le sol.

Le propriétaire tremblait comme une feuille, se disant que son annonce à la maison de missions ne lui avait fait que ramener un problème supplémentaire au sein de son restaurant. La bête aux yeux rouges avait cette voix autoritaire que lui n’avait pas.

Une grande inspiration… suivit d’une profonde expiration. Yuuma s'efforçait de se calmer. Peut-être qu'elle c’était retrouvé là pour justement venir en aide à la brochette d’idiot et d’imbécile qui se trouvait ici-bas. Ou plutôt voulait-elle profiter de la détresse du propriétaire pour conclure une affaire qui saurait lui être favorable. Oui… conclure une affaire. Voilà que les intérêts du propriétaire et de la bête avide se croisèrent.

-Si vous ne voulez pas rester au fond, il faudra payer l’addition. En ce bas monde, on a rien sans rien. Commençait Yuuma, histoire de mettre le malheureux dans l'ambiance. Elle était bien polie curieusement. Mais ce début de sourire laissait présager qu’il y avait anguille sous roche dans cette affaire.

-He bien… l’annonce faisait déjà mention de 50 zénies et…

Prenant dans ses mains la carte du menu, Yuuma présenta celle-ci à son interlocuteur, pointant du doigt le tarif indiqué pour un “Repas gastronomique complet.” L’ongle, similaire à une griffe, tapotait avec insistance le fameux détail déplaisant : “50 zénies”. Ladite récompense avait la même valeur que le repas immonde qui lui avait été servi. Le pauvre restaurateur déglutit, ce regard, ces crocs, ses griffes… il comprit très certainement, à cet instant, que son interlocutrice n’avait rien d’un prophète mais avait plutôt des allures de diable.

-J'exige de pouvoir manger ici autant qu’il me plaira.

Autant qu’il plaira à une "brindille haute comme trois pommes”. Le propriétaire se contentait d'accepter sans réelle conviction à la seule et unique condition que la bête parvienne à sauver son affaire. Néanmoins, le pauvre bougre était loin d’être au courant de quelle pouvait être l’étendue de la faim de son interlocutrice et ignorait quelle méthode le monstre emploierai afin que son prix énoncé devienne une réalité. Un frisson parcourut l’échine d'Antonio lorsqu’il vit le visage de Yuuma être marqué d’un large sourire sinistre. Ses joues et ses fossettes se soulevèrent, donnant l’illusion que même son regard souriait avec malveillance.

-Ainsi-donc nous avons un accord... Yuuma Toutetsu... tout le plaisir est pour moi... keheheh...



Des esprits aigles apparurent à divers endroits du restaurant dès l’instant où les deux individus se serrèrent la main pour s’entendre sur les termes de leur contrat. Les créatures spectrales se mirent à prendre possession de tous les employés qui exaspèrent. Néanmoins, soyez assuré que la gastronomie était entre de bonnes serres, grâce à ses esprits aigles qui sont bien trop fiers. Serveurs et cuisiniers, personne n’est épargné. Un à un, ils se voient nantis d’un regard violacé. Faites donc confiance aux plus arrogants. Tout ce qui est découpé, charcuté, assaisonné avec assurance, est garantit avoir la meilleure fragrance. Tel était cet air de malheur qui embaumait tout en une délicieuse odeur. Un parfum invitant quiconque était affamé à venir jusqu'ici se rassasier.

D’après les esprits qui revenaient vers elle, il y avait des problèmes autres que la nourriture en elle-même. La serveuse passait son temps à voler le peu qu’il y avait dans le pot à pourboires et la caisse. L'accueil était aussi aimable qu’une pierre tombale et le cuisinier était une feignasse qui avait trop peur de la saleté pour songer à nettoyer un minimum sa cuisine. Ou alors… le problème venait tout simplement du propriétaire lui-même qui n’était pas foutu de correctement se faire respecter par ses employés. Tant de problèmes et de petit détail à gérer… et surtout un estomac qui crie famine ! Yuuma n’était pas cuisinière et encore moins psy… Alors la Taotie claqua des doigts et la teinte violacée s'éclipsa du regard de tous les acteurs de cette vaste mascarade. Il y avait quelqu’un, ici présent, qui avait grand besoin d’apprendre à prendre des décisions. La vie est malheureusement faite de choix difficiles.

Laissez la fin progresser ou la fortune le combler, c’était à Antonio de choisir son destin. Lui seul étant désormais sous l’influence d’un esprit aigle. Le nouvel Antonio était hautain et arrogant. Rien à voir avec la chiffe molle qu’il était. Et surtout… son côté avare ressortait avec brio. Après tout, on ne construit pas une entreprise sans l’intention derrière de toucher gros…

Inévitablement, quelques têtes perdirent leur emploi tandis que d’autres se firent remonter les bretelles. En voilà un brave petit humain comme on les aime : orgueilleux, avare et conquérant à souhait ! Antonio prenait enfin des décisions qui faisaient sens ! Un grand jour pour le capitalisme ! Quelques jours plus tard, et un petit ravalement de façade plus tard. La réputation de l’établissement, c’était largement amélioré. Hélas, cela ne s'était pas fait sans changer le nom de l'enseigne. Celui-ci étant associé à une gastro expresse dès qu'il parvenait aux oreilles des possibles futurs clients. Puis soyons franc "Chez Antonio"... c'était d'un ringard. “Le festin des Aigles” ça, c’était un nom qui avait de la gueule ! Même s’il était probable que l’idée venait plus de l’esprit animal que l’individu lui-même…

***

Au festin de la Taotie: Un repas infini, table exceptionnelle au mille et un plat agrémentés d'épices et de sel. Enfin de la bonne et délicieuse nourriture ! La bête avalait les plats goulûment sans y laisser la moindre miette. À cet instant, Antonio reprit brièvement ses esprits, debout au milieu d’une salle fourmillant de client qui en avait pour leur argent. Le quarantenaire écarquilla des yeux. Il n’en revenait pas. C’était lui qui avait pris toutes les décisions qui avaient mené à ce résultat-là ?! Et qu’était-il advenu de ses anciens employés ? Combien de temps s'était-il écoulé ? Tant de questions qui furent irrémédiablement balayées lorsqu’il entendit le bruit de la caisse enregistreuse qui n’avait de cesse d’accumuler encore et toujours plus de zénies.  

-Je ne comprends vraiment pas… Pourquoi une illustre cheffe comme vous souhaiterais pouvoir manger autant qu’elle le veut ici ? Je veux dire… vous savez sûrement mieux vous y prendre que nous en matière de cuisine. Pourquoi vouloir revenir ?

-Munch… munch… J’ai jamais dit… croumch… que j’étais cuisinière.

-Quoi ?!!! Mais alors… à quoi elle sert cette cuillère !?

-Vous savez Antonio… *répliqua Yuuma en s’essuyant la bouche d’un revers de poignet avant de reprendre* si vous êtes né avec un nez en plus d’une bouche. C’est pour que vous puissiez la fermer et continuer de respirer malgré tout… Profitez… Admirez… Bientôt, vous serez riche et moi, keheheh... Je me régale !

-Et… m-ma famille ?

-Quoi ? Comment ? Qui ça ? Ces bons à rien qui vous servaient d’employés ?! Vous les avez virés ! Vous avez oublié ? À ne pas vous soutenir… À toujours tiré vos rêves et vos DÉSIRS vers le bas... Il n'y a aucune honte à ça ! Ce restaurant après tout… c’est toute votre vie, n’est-ce pas ? Il n’y a de la place pour rien ni personne d’autre. Et puis de vous à moi… c’est très bien comme ça… c’est ce qui rend vos nouveaux plats si… savoureux

Alors que l’horreur commençait à envahir le regard désespéré de Antonio, un sourire inquiétant apparut sur son visage dès l’instant où ses yeux prirent à nouveau une teinte mauve. Était-ce des larmes de tristesse et de regret ou bien des larmes de joie ? Comme c’était adorable… pauvre Antonio n’avait jamais gagné autant de zénies en une soirée qu’il en pleurait des larmes de joie. C’était bien de la joie, ça ne pouvait être rien d’autre que ça… n’est-ce pas ? L'entreprise était de nouveau à flot, et était désormais lancée sur la voie de la prospérité. Tout était comme il l'avait parfaitement souhaité. C'était bien ce qu'il avait désiré lorsque de l'aide, il est parti chercher ?~
 
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