Carte sur table

Inviter Sharotto à leur bord aussi vite, alors même qu'il n'avait pas fait mystère de son inimitié passée envers le prince, pouvait paraître être une idée risquée... Mais tout le principe de cette entreprise n'était-il pas de miser sur le changement, la possibilité que les Saiyans pouvaient évoluer ?
D'une certaine manière, être tombé sur cette vieille connaissance fournissait à Vegeta un nouvel échantillon ; un exemple supplémentaire de ce que son peuple était aujourd'hui. S'il avait déjà pu observer Oishi - et Motta dans une moindre mesure -, ce n'était pas encore assez pour avoir une notion précise de la façon dont ils avaient évolué en son absence. D'autant que ni l'un ni l'autre n'était nécessairement représentatif du guerrier moyen, l'une de par sa désertion - preuve formelle qu'elle n'était plus en adéquation avec le régime -, l'autre par son statut qui rendait difficile de le considérer comme le premier venu.
Qui plus est, le côtoyer plus longuement serait aussi l'occasion de vérifier si la hache de guerre était bel et bien enterrée ou s'il continuait - consciemment ou non - de lui porter rancune. S'il devait rester sur place pendant une période prolongée, il avait tout à gagner à savoir si quelqu'un comptait lui mettre des bâtons dans les roues ; la tâche s'avérerait déjà suffisamment compliquée sans se soucier d'un éventuel sabotage.
...Mais surtout, au-delà de tout cela, on ne lui avait pas réellement demandé son avis : c'était Bulma qui lui avait imposé la présence de ce congénère plus qu'il ne l'avait lui-même choisi - non qu'il y voie un réel problème dans l'immédiat. Qu'avait-il à craindre, de toute manière ? Le Saiyan lambda avait pour meilleure arme sa forme de gorille géante, et encore lui fallait-il trouver une lune pour l'adopter ; qui plus est, le saisir par la queue suffisait à le neutraliser. Si vraiment cela devait s'avérer nécessaire - ce qui serait tout de même malheureux -, Trunks suffirait amplement à l'arrêter... Dès lors, que risquaient-ils ?

Ainsi donc considéra-t-il le fait que Sharotto ne finisse pas sa phrase - n'arrive pas à exprimer « ce qu'il était » - pour une simple gêne quant à ses origines ; connus pour être les âmes damnées de Freezer, les Saiyans n'avaient pas exactement bonne réputation à travers la galaxie, et ce n'étaient pas leur courte disparition qui allait y changer quelque chose. C'était bien ce qui rendait compliqué de redorer leur blason.

« Parle. Je t'écoute. » rétorqua-t-il quand son interlocuteur en vint enfin à vouloir s'expliquer au sujet sa présence sur Terre.

Et effectivement, Sharotto avait des choses à dire, évoquant des faits et des personnes dont Vegeta n'avait jamais entendu parler - malgré le fait que tout cela se soit déroulé à à peine quelques mètres de chez lui. À vivre au sein des quartiers de la Capsule Corporation, il savait parfois se trouver pratiquement en autarcie - le privilège des nantis -, mais de là à ce qu'il ignore tout de ces événements, n'ait rien senti de ce qui avait bien pu se produire... Aurait-il été loin de la Terre au moment des faits, pour une raison ou pour une autre ? Encore que c'était peut-être trop insignifiant pour qu'il y ait été sensible ; ce qui, aux yeux de Sharotto, constituait une crise majeure n'était peut-être pas digne de son attention... Même s'il eut - chose rare - la délicatesse de ne pas le mentionner. Mais quand diable - et surtout comment - le retour des Saiyans s'était-il produit, pour qu'il ait tant de choses à raconter ?

« Au sujet de ce... « Bond en avant », comme tu dis, j'ai peut-être un début de réponse à te donner. Vois-tu, il existe à certains endroits dans la galaxie des boules magiques capables d'exaucer les vœux. Si les conditions sont réunies, elles sont même capables de ressusciter les morts. Pour tout te dire, j'en ai déjà moi-même bénéficié. »

À deux reprises, se garda-t-il d'ajouter ; une fois sur Namek il y a des années après avoir été assassiné par son ancien employeur, et sur Terre plus récemment. Deux fois de trop - mais il ne pouvait pas se permettre d'être mécontent qu'elles en aient été capables ; qu'il soit encore là grâce à elles. Sans mot dire, Trunks - qui, pourtant, n'avait jusqu'alors aucunement fait mine de s'intéresser à la discussion - vint s'agripper à sa jambe, sans oser le regarder dans les yeux, sans doute encore un rien traumatisé par son sacrifice, encore frais dans les esprits. Son père posa la main sur sa tête avec l'ombre d'un sourire, puis reprit sa conversation.

« Lorsqu'ils sont morts, la plupart des gens ne gardent pas de forme physique dans l'Autre Monde. Ils deviennent une sorte d'âme errante en attendant d'être jugés... Et je suis désolé de te le dire, mais la plupart d'entre nous ne vont pas au Paradis après l'avoir été. »

Étant lui-même peu renseigné à cet égard, il ne jugea pas utile de se lancer dans une explication plus poussée concernant le fonctionnement de l'Au-Delà - notion qui n'avait pas vraiment sa place dans leur culture -, lequel n'était de toute façon pas le sujet principal de ce qu'il était en train d'expliquer. De même ne vit-il pas l'intérêt de préciser qu'il avait quant à lui bénéficié d'un traitement de faveur lors de son dernier passage au poste-frontière...

« Où que tu aies pu atterrir, si tu es mort pendant longtemps, c'est normal que tu n'aies plus la notion du temps. J'ai eu la chance d'être ramené assez vite en ce qui me concerne, mais si ça n'avait pas été le cas, je suppose que j'aurais été dans la même situation. »

Ce qui lui donnait matière à réfléchir. S'il avait lui-même évoqué l'idée que son peuple était « en décalage » avec l'époque dans laquelle ils vivaient désormais, il n'avait pas forcément pris la mesure du retard accumulé ; d'à quel point ce pouvait être déstabilisant pour eux, de se retrouver soudain au centre d'une galaxie qu'ils ne comprennent plus, à être la cible de tous les regards. À quel point avaient-ils pu combler ces lacunes depuis leur retour ? Trunks étant retourné à ses activités, le prince recroisa les bras aussitôt.

« Pour que tu aies soudainement ressuscité sans explication apparente, les Dragon Balls, ces fameuses boules dont je te parlais, doivent y être pour quelque chose. Quelqu'un a dû faire un vœu qui t'a inclus d'une manière ou d'une autre. » reprit-il avec tout son sérieux, tenant à ce que son semblable comprenne qu'il ne plaisantait nullement, aussi invraisemblable que son discours puisse paraître.

Sans pouvoir pleinement anticiper sa réaction, il s'attendait à une certaine incrédulité ; c'était assez grotesque pour qui n'y était pas habitué, et il en avait bien conscience. Le concept-même de « magie » n'avait qu'une place réduite dans leur imaginaire, et il était d'ordinaire réservé aux peuples dotés de pouvoirs qu'ils ne comprenaient pas pleinement. Alors de là à penser qu'il puisse exister un artefact - ou plutôt sept - à même de réaliser n'importe quel désir... C'était trop beau pour être vrai. En tout cas, ça ne pouvait pas être le vœu dont ils s'étaient servis pour effacer les méfaits de Black... À moins que... ?

« Pour tout te dire, je pense même qu'elles ont quelque chose à voir avec le retour de notre planète... Même si je ne sais pas vraiment qui aurait pu vouloir la faire revenir. »

Oui, qui ? C'était bien là la question. Au moment de l'extinction de leur espèce, les Saiyans étaient honnis universellement - au sens littéral du terme. Et le temps passant, une fois leur fin célébrée, l'oubli avait commencé à s'installer. Quelqu'un ne se serait-il donné la peine de les faire revenir que pour pouvoir se venger d'eux personnellement ? C'était triste à dire, mais c'était encore l'explication la plus probable.

« Je me suis brièvement demandé si Broly pouvait y être pour quelque chose... Mais soyons francs : il est trop stupide pour être capable de les réunir. »

Le Super Saiyan Légendaire était - il l'avait constaté de ses yeux - un être entièrement dédié à la destruction, au sens premier du terme. Qu'il puisse créer - ou plutôt recréer - quelque chose semblait parfaitement antithétique, fut-ce sa planète natale. Son père, Paragus, aurait déjà été un coupable plus crédible... Mais fort heureusement, l'existence des Dragon Balls n'avait pas eu le temps de parvenir à ses oreilles avant qu'il meure de la main de sa progéniture.

« De mon côté, je suis surtout étonné d'apprendre que le Ruban Rouge existe encore... Nous nous sommes battus contre lui par le passé, et je pensais que nous avions exterminé ses derniers représentants. » fit-il en grimaçant.

Après avoir annihilé le laboratoire du docteur Gero et son ultime création, que pouvait-il bien rester de leur organisation ? Se pouvait-il que C-17 et C-18, seuls rescapés à sa connaissance - épargnés sous le prétexte d'être des « victimes » ; encore une erreur ? - aient quelque chose à voir avec cette résurgence ?
Certes, ayant lui-même chassé ce qu'il pensait être les derniers vestiges de l'armée de Freezer pour mieux la voir ressurgir des années après, il savait qu'il n'était pas facile d'éradiquer entièrement des organisations de cet ampleur... Mais une fois encore, il fatiguait de voir sans cesse ressurgir des problèmes dont il pensait être débarrassé définitivement.

« Comment ont-ils pu savoir que la planète était revenue et que sont-ils venus y faire ? C'est la question que je me pose. »

Énième étape d'un projet de vengeance envers Kakarot - et plus globalement les Saiyans - après qu'ils aient déjoué les plans du savant fou et de sa créature ? Volonté d'étudier de plus près la race de ceux qui les avaient tenus en échec ? Avaient-ils seulement pris la peine de les informer de leurs intentions, ou les Saiyans s'étaient-ils réveillés un beau matin pour les voir débarquer sans autre explication ?...
C'était une chance que cela n'ait pas tourné en guerre ouverte entre les deux planètes, alors même que le gouvernement de la Terre n'avait rien à y voir... Le simple fait que les Saiyans aient été capables d'une réponse aussi mesurée - de comprendre les nuances de cette situation et d'en tenir compte - était la preuve qu'ils étaient plus réfléchis que par le passé, et c'était pour le mieux.
Laissant finalement ses bras retomber le long de son corps, le prince se redressa de toute sa hauteur - toute limitée soit-elle - pour faire face à son compatriote, les lèvres étirées par un sourire en coin.

« Je n'aime pas rester à rien faire. Que dirais-tu de t'entraîner ? Après tout ce temps dans l'Autre Monde, tu dois avoir besoin de te dérouiller, je me trompe ? Nous pourrons continuer de parler en même temps. »

Et surtout, cela éviterait que sa femme se retrouve impliquée dans toutes ces histoires. Si elle n'avait rien dit, il n'était pas sans se douter que la mention du Ruban Rouge contre lequel elle avait personnellement lutté à une époque lui avait fait tendre l'oreille. S'il fallait s'occuper d'eux une fois encore, il préférait qu'elle n'y soit pas mêlée ; cela avait failli lui coûter la vie la dernière fois. L'en préserver était peut-être le mieux qu'il puisse faire pour se faire pardonner - et se pardonner lui-même - de n'en avoir eu que faire à ce moment-là.

« Et voilà ! C'est toujours pareil... » fit Bulma en roulant des yeux, la mine faussement boudeuse. Néanmoins consciente que ses râleries ne seraient pas une force de dissuasion suffisante, elle ajouta, agitant la main pour leur faire signe de déguerpir : « Je sais que je ne peux pas vous en empêcher, mais tâchez tout de même de ne pas abîmer le vaisseau... Je n'ai pas envie de finir aspirée dehors parce que vous n'avez pas su vous tenir ! »
« Oh ! Vous allez vous battre ?! Et moi p'pa, je peux venir ?! » s'exclama Trunks, beaucoup trop enthousiaste à l'idée de les voir s'affronter - et peut-être même d'y participer.
« Après tout, pourquoi pas... À moins que tu y voies un inconvénient ? » répliqua-t-il en avisant Sharotto, curieux de sa réaction à l'idée de se battre contre son jeune fils. « Ça te fera un bon échauffement. Il est plus fort qu'il n'en a l'air... »

« C'est ma théorie. » répliqua Vegeta en haussant légèrement les épaules.

N'ayant qu'une expérience limitée de la chose - fallait-il vraiment s'en plaindre ? -, il n'avait pas la prétention d'être un expert à ce sujet.
Lui-même n'avait eu droit à un traitement de faveur qu'en raison des circonstances exceptionnelles dans lesquelles son dernier décès s'était déroulé. Ce n'était pas qu'il l'avait mérité ; c'était que les bureaucrates de l'autre monde, craignant pour leur propre non-vie, n'avaient eu d'autre choix que de compter sur lui.
Par conséquent, il n'était pas en mesure d'affirmer que la situation dans laquelle se retrouvait Sharotto était « normale », étant donné que la sienne ne l'était pas ; il n'avait aucun point de comparaison. Tout au plus pouvait-il se fier aux informations glanées auprès de Kakarot et de ses compagnons - à un vécu que certains d'entre eux lui devaient personnellement.

« Si tu veux en avoir la certitude, la meilleure chose à faire est encore de t'y rendre et d'aller leur poser la question... Mais ça risque d'être difficile à moins de mourir à nouveau. » fit-il avec un sourire en coin, ne sachant que trop bien que ce n'était pas une option.

D'autant que s'il venait à périr à nouveau, il n'aurait cette fois aucune certitude de pouvoir en revenir - ne serait-ce que parce que les Dragon Balls n'étaient plus aussi accessibles désormais, en dépit de celle sur laquelle il avait pu mettre la main par accident.
Et c'était sans compter le fait que certaines d'entre elles ne soient pas en mesure de ramener plusieurs fois le même individu du royaume des morts. Une précision d'importance, mais qu'il n'avait pas jugé utile d'apporter pour ne pas ajouter à la confusion de son interlocuteur : la notion selon laquelle il existait une vie après la mort - et que certains privilégiés y faisaient des allers-retours de manière presque anodine - n'était déjà pas facile à encaisser.

En échange de ces informations, Sharotto lui apprit en retour ce qu'il savait de cette « nouvelle version » du Ruban Rouge et de ceux qui - selon lui - y étaient associés, ou du moins l'avaient été au moment où il s'y était confronté. Kafka, Seishiro... Ces noms ne disaient rien au prince des guerriers, qui n'avait retenu que celui du docteur Gero, le seul à avoir une quelconque pertinence au milieu de tous ses pantins numérotés. Bulma en saurait peut-être plus, mais il en doutait, à moins qu'ils soient eux aussi d'éminents chercheurs ; la notoriété du savant fou au sein de la communauté scientifique était la seule raison pour laquelle elle avait pu l'identifier lorsqu'ils s'étaient mesurés à lui.
Qui plus est, Sharotto était d'avis qu'ils devaient avoir été exterminés depuis - ce qui expliquerait qu'ils n'aient pas pu causer plus de dégâts pour se faire connaître.

« C'est une bonne chose de réglée. » fit sobrement Vegeta, guère affecté. « Nous avons déjà assez à faire sans retourner éradiquer la vermine qu'on a oublié la dernière fois. »

Il en savait quelque chose, ayant jadis lui-même tenter d'éliminer les derniers vestiges de l'empire de Freezer après la mort - apparente - de ce dernier, sillonnant les étoiles à la recherche des avant-postes encore peuplés. Une tâche qui s'était rapidement avérée aussi fastieuse que futile, aucun des troufions exécutés de cette façon - plus qu'il n'en saurait compter - ne représentant un quelconque danger ; c'était la soif de vengeance qui avait motivé sa démarche, pas un quelconque altruisme. Même ainsi, les éradiquer entièrement aurait pris des années s'il avait été jusqu'au bout des choses.
Inutile de dire que la perspective de devoir s'acharner à l'identique sur ce « nouveau Ruban Rouge » ne l'enchantait pas davantage, a fortiori s'ils n'avaient pas - plus - de combattant à sa mesure à lui opposer. En outre, il préférait savoir qu'il n'avait pas quitté la Terre en y laissant une énième menace dormante, étant donné tout ce qu'elle avait déjà eu à subir récemment. Somme toute, puisse Sharotto avoir raison : ça leur ferait des vacances.

Alors qu'ils laissaient cela de côté, Trunks demanda à participer à leur entraînement avec un enthousiasme tout juvénile, et Sharotto n'était pas en position de refuser - pas alors qu'ils commençaient seulement à reconstruire leur relation sur des bases saines et qu'il profitait de leur hospitalité. Conscient de la délicatesse de sa position, Vegeta se contenta d'arborer un sourire narquois, préférant garder le silence et voir comment son vis-à-vis allait s'en dépêtrer.
Comme la plupart de leurs congénères, il ne savait pas vraiment comment s'y prendre avec les enfants ; qu'ils aient pris pour habitude de les élever en cuves, les laissant grandir dans leur bocal pendant qu'ils retournaient guerroyer n'aidait pas vraiment à développer des instincts parentaux poussés. Sans doute n'en avait-il pas encore à lui, mais cela n'y aurait donc pas nécessairement changé grand chose. Bien sûr, leur invité n'avait aucun moyen de savoir qu'il n'avait pas affaire à un bambin ordinaire... Ce ne serait pourtant pas faute de l'avoir prévenu.

« Allez-y. Je vous regarde. » fit simplement le prince en allant se mettre en retrait, leur laissant toute la place dont ils auraient besoin pour s'exprimer.

Bien sûr, savoir que son père était là pour l'observer - une chance qu'il n'avait que trop rarement - était pour le jeune Trunks une motivation supplémentaire : il était on ne peut plus décidé à l'impressionner. Ce ne serait peut-être pas un combat à proprement parler, Sharotto ayant proposé un jeu plutôt qu'une confrontation directe, mais cela ne voulait pas dire qu'il ne pouvait pas éblouir par ses performances !
Les règles improvisées de leur échange en faisaient toutefois un test d'adresse plutôt que de force brute, ce qui ne jouait pas forcément en la faveur du Saiyan au sang-mêlé. S'il possédait une puissance absurde pour son âge, la technique lui faisait encore cruellement défaut ; malgré des rudiments solides inculqués par son père, il était plus habitué à « jouer à la bagarre » qu'à se battre pour de vrai, et n'avait dès lors pas encore pu pleinement développer ses instincts guerriers.
À l'inverse, Sharotto avait à ce jour des années, voire des décennies de combat derrière lui - dont beaucoup à mort, à n'en pas douter - et les réflexes aiguisés que l'on pouvait attendre de la part d'un soldat expérimenté, quand bien même il venait seulement de retrouver son corps. C'est à cela que le prince prêta attention plus qu'aux tentatives de sa progéniture - si méritoires soient-elles -, en vérité ; cela lui permettait de mieux savoir à quoi s'attendre concernant ce compagnon d'armes. Quel niveau fallait-il avoir pour gravir les échelons dans la « nouvelle » société Saiyan ?

Acculé après quelques minutes de vaines gesticulations, Trunks, mauvais perdant, finit par recourir à son atout : sans crier gare, il se changea en Super Saiyan, se libérant aisément de l'étau dans lequel son « adversaire » l'avait emprisonné. La surprise et le gain de puissance qui en résultèrent lui permirent de porter une attaque dérisoire mais néanmoins décisive, signant sa victoire - aussi injuste qu'elle puisse paraître - face au défi qui lui était proposé.

« HA ! Ouais ! J'ai gagné ! » exulta Trunks avant de retomber au sol, sans se soucier de reprendre son apparence normale. «  T'as vu, papa ?! Hein, t'as vu ?! »
« J'aurais peut-être dû te prévenir... » lança négligemment Vegeta au « perdant » de cette épreuve, s'avançant pour les rejoindre sans perdre son sourire.

Cette transformation impromptue était peut-être une solution de facilité, une méthode que certains qualifieraient de déloyale, mais le prince ne pouvait s'empêcher d'éprouver une pointe de fierté en assistant au triomphe de son fils ; à sa victoire sur un homme, Saiyan qui plus est, selon les règles que celui-ci avait lui-même édicté. À défaut de compliments, il posa une main paternelle sur l'épaule de son enfant - lequel parut pouvoir parfaitement s'en contenter, relevant vers lui un visage comblé, exempt de toute la frustration qui l'habitait quelques secondes auparavant.
Puis, tournant son regard vers un Sharotto encore ébahi - et comment l'en blâmer ? -, le prince prit alors le parti d'endosser lui aussi cette mythique apparence, teintant d'or sa sombre chevelure, remplaçant par l'azur la noirceur de ses yeux.

« Tu n'étais peut-être pas au courant, mais le Super Saiyan n'est plus une simple légende... Broly n'est pas le seul à pouvoir se transformer ! »

Si cela pouvait sembler évident pour eux qui avaient depuis longtemps conquis ce pouvoir - et en avaient même déjà surpassé les limites, à plusieurs reprises -, les Saiyans ordinaires, restés sur leur planète, n'avaient a priori jamais pris conscience de leur véritable potentiel. Pour eux, ce n'était sans doute qu'un rêve irréaliste,  qu'une légende méconnue comme cela l'avait été pour lui avant que Kakarot - toujours lui ! - ne leur pave le chemin vers cette force enfouie.
Oui, le Super Saiyan était une réalité - et il y en avait déjà plusieurs dans l'univers, y compris un enfant qui n'aurait pas forcément été en âge de conquérir sa première planète selon leurs régulations. N'ayant lui-même pas forcément bien vécu ces deux nouvelles lorsqu'il avait dû en prendre connaissance de manière séparée, il n'imaginait que difficilement ce que ce devait être de les recevoir coup sur coup.

« Tu t'es bien débrouillé, Trunks. Mais c'est à mon tour, maintenant. Écarte-toi. »

Faiblement mais fermement, il repoussa son fils vers l'arrière, lequel s'exécuta sans discuter. Il avait eu ce qu'il voulait, et ne voyait plus de raison de s'attarder ; il avait bien mérité une friandise en guise de célébration. Qui plus est, il savait que refuser les consignes de son père, même les plus anodines, n'était pas dans son intérêt - et était lui aussi curieux de la suite des événements, avec laquelle il ne souhaitait aucunement interférer. Si combat il devait y avoir, il voulait y assister. S'il n'ignorait pas que Son Goku était de taille à rivaliser avec son père, c'était - à sa connaissance - le seul à en avoir la capacité, même Gohan tremblant à l'idée de devoir l'affronter ; qui que soit cet homme, il ne devrait en faire qu'une bouchée !

« Si bien sûr tu veux toujours m'affronter ? » fit-il en tendant la main en direction de Sharotto, non pas pour l'aider à se relever mais pour lui faire signe d'approcher - d'éprouver sa légende ; la force du guerrier doré.

Bien évidemment sa défaite était totale. Rare - pouvant être compter sur les doigts d’une main - où le fier guerrier s’était laissé désabusé d’une situation dans laquelle il se pensait bien au-delà de ses capacités. Honteux, mais surtout complètement abasourdi par l’aisance de l’enfant à pouvoir revêtir cette forme légendaire. Il n’en fallut guère davantage pour que le feu prince ne vienne s’interposer, son visage empli d’une certaine fierté - une fois n’était pas coutume - face à la victoire de son sang. Comme il y était, celui-ci en profita pour arborer la même lueur dorée - synonyme évident de sa maîtrise du Super Saiyan - mais ce coup çi, l’enveloppe légendaire de cette forme n’évoqua aucune nouvelle surprise sur le faciès du roi déchu.

« Broly encore…» marmotta-t-il dans son coin alors qu’il testait sa mâchoire suite au coup qu’il avait reçu. Il s’agissait de la seconde personne qui lui évoqué ce nom, pour autant il n'avait absolument aucune idée de qui il s’agissait, ni même s’il s’agissait du “Roi” qui avait pris la suite de Pythar comme lui avait indiqué Scalio
« Bien entendu ! » s’exclama-t-il cette fois tout en se redressant et en balançant sa tête de gauche à droite pour faire éclater les bulles d’air contenu dans ses cervicales - manière la plus propice pour faire entendre son envie d’en découdre - libérant alors le peu de tension contenu en lui. Un frisson d’excitation imbibé sa chair, l’absolu condition qui fait d’un saiyan un saiyan. Trunks, félicité, s’écarta alors rapidement et alla s'installer à quelques mètres, le regard au moins autant rempli de contemplation que la détermination animant les anciens rivaux. Le guerrier en armure pris soin de retirer celle ci, l’objet n’étant pas nécessairement de se mettre à hauteur de son adversaire - ce genre d’attirail n’apportant au final pas de réel avantages au vu du niveau des protagonistes -, mais simplement de conserver une veste en bonne et due forme pour son retour sur la planète mère. Afin de rendre l’honneur de l’invitation - en dépit même de sa nature - Sharotto engagea alors le premier assaut, chargeant directement vers son adversaire, qui confiant, n’avait pas réellement pris le temps d’adapter une posture de combat des plus impressionnantes. Il détestait avoir à faire le premier pas, le style de combat de Sharotto se reposait clairement sur un style plus défensif et de soutien, néanmoins la proximité de la salle d'entraînement - si tenté que l’on ai la légitimité de comparer cela ainsi - lui offrait la possibilité de briller au corps à corps, chose dans laquelle il excellait. Engageant alors le combat rapproché - sous la forme d’un sparring - l’ancien élite vint s’essayer au bras avant tout. Que ce soit de simple jabs à toute tentative de coups issu du panel qu’il maîtrisait, rien n’arrivait pour le moment à réussite, Végéta se contentant - avec une certaine aisance frustrante - d’esquiver chaque action amenée à sa portée. Sans se montrer en reste, Sharot accéléra son rythme jusqu’à produire l'entièreté de la vélocité qu’il pouvait atteindre, cependant la situation n’évoluait pas, ou du moins pas de la manière souhaité, puisque d’un seul coup, son corps s’immobilisa et une gerbe de salive s’extirpa de sa mâchoire. Pliant le genou, une seconde fois, au pied de celui qui donnait sens au mot arrogance, Sharotto avait compris que le prince avait saisi l’occasion d’enfin contre-attaquer. Un seul et simple coup - soigneusement placé au niveau du foie - avait terni les prémices de l’ardeur du guerrier. Le souffle coupé, haletant tel un animal, il reprenait difficilement son état, son honneur venait d’être à nouveau bafoué ainsi il jura
« C’est la seconde fois que je met genou à terre… Cela n’arrivera plus. »

L’on pouvait penser que l’orgueil parlait pour lui, mais il n’en était guère le cas. Cette fois-ci, plus question de tergiverser ou de prendre de haut celui qui devait devenir le futur Roi de Végéta. Se relevant dans la longueur, quelque chose semblait petit à petit changer, puisque l’aura bleuté, caractéristique de la nature saiyanne, vira à une couleur bien plus chatoyante, et dont les deux spectateurs pourraient rapidement reconnaître. Les cheveux suivirent la même transition, s’élevant légèrement. La seule différence notable était son œil droit qui conservait toujours sa teinte écarlate, la marque de Vassreoth.
« Je suis bien entendu au fait, Végéta. J’étais simplement surpris que ton fils, si jeune soit-il, soit capable de maîtriser cette forme. Nous allons pouvoir passer aux choses sérieuses !» frémit-il à nouveau à l’idée de faire cette fois-ci étalage de ses capacités. A l’instar de son attitude depuis le début, il choisit à nouveau d’être à l’initiative du réengagement. Profitant d’une meilleur proximité, il choisit cette fois ci de projeter son poing gauche en pivotant son corps, en somme il s’agissait d’un crochet, un coup se voulant plus puissant qu’un simple jab, et nécessitant souvent une esquive, ou à défaut une parade. Le flanc droit du visage de Végéta était visé, et pourtant c’est bien la joue gauche du père de Trunks qui vint subir un revers direct. Comment ? Sharotto avait simplement fait étalage d’une de ses techniques : la transposition. Leurrant ainsi son partenaire d'entraînement afin d’ouvrir sa garde du côté d'où venait sa réelle attaque, jonglant immédiatement avec sa finesse d'exécution , l’ancien dyarque en profita pour enchaîner rapidement avec une série de jab, dont la dernière de la série agrippa le haut du col de la tenue de son adversaire, afin de le tirer vers lui pour placer une coup de genou sauté en plein buste. Pour mettre un terme à cette série, il lâcha l’étreinte de son vis à vis et avec la paume de sa main libre tenta une frappe au niveau du menton afin de défaire le contact entre les deux adversaires.

Reste à savoir si cet assaut avait fait un minimum mouche, où s’il allait devoir revoir toute sa stratégie.